Cette comédie printanière signe le retour d’Isabelle Mergault (Je vous trouve très beau, Enfin veuve) derrière la caméra après quelques années d’absence sur la scène cinéma. Un scénario naïf et incongru qui fait réfléchir aux valeurs qui nous animent. Le tout dans une ambiance champêtre bien sympathique
Philippe (Lambert Wilson) est un écrivain reconnu qui, à l’aube de la soixantaine, mène une vie bourgeoise et, il faut bien le dire, un brin ennuyeuse. Il écrit plein de bouquins et est donc persuadé qu’il a réussi. Sa femme Rose (Sylvie Testud, en professeure exaltée) pense pareil. Il fréquente un cercle d'amis de haut rang et vit dans un gigantesque manoir bien propre, entouré de domestiques dévoués. Et puis, surtout, il va entrer à l'Académie française. Tout irait donc merveilleusement bien dans son monde très (trop) lisse si l’écrivain ne souffrait pas de terribles maux de dos qui le rendent acariâtre et même carrément grossier avec tout son entourage.
Mais la vie réserve parfois de drôles de surprises. Au retour d’un rendez-vous, Philippe a un accident de voiture sur une route de la campagne normande… et se retrouve, inconscient, dans le lit de Martha (Josiane Balasko), une femme aux mains guérisseuses et à la tête pleine d’une douce folie.
Pas besoin d’être grand clerc pour comprendre d’emblée que la vie de Philippe va forcément changer au contact de Martha. Mais pas tout de suite, tout de suite, les deux personnages devant d’abord s’apprivoiser. Et bien entendu, ça va prendre un peu de temps. Entre le futur académicien au langage châtié et cette villageoise un peu simple qui a du mal avec les accords des adjectifs (« des bocals », ça fait vachement mal aux oreilles quand même), ce sera d’abord un peu forcé, Philippe ne s’autorisant ces visites que quand son dos l’empêche de vivre.
Mais Martha est un esprit libre. Elle ne s’embarrasse d’aucune règle de savoir-vivre, d’aucune contrainte, d’aucun complexe. Elle vit de peu, prodiguant des soins à tout qui lui apporte un pain, quelques légumes ou la moitié d’un jambon. Elle chante aussi, animant les soirées de l’auberge du village. Une générosité que les villageois chérissent et protègent. Les exigences de ce mec égoïste ne vont pas simplifier la vie de leur guérisseuse qui aura bien besoin de leur amitié pour résister au charivari provoqué par cette intrusion dans sa vie toute simple.
Autant le dire de suite : Des mains en or ne brille pas par l’originalité de son scénario. Mais le duo Wilson-Balasko est cocasse et certaines scènes sentent le vécu (qui n’a jamais insulté un GPS qui vous somme, en boucle, de « faire demi-tour dès que possible » !). On passe un gentil moment, sans trop d’attentes. On rigole aux frasques de Martha, à ses tournures de phrases approximatives et on apprécie les très jolis décors de la campagne normande. Et puis, osons le dire, on se moque aussi avec beaucoup de plaisir de ces intellectuels qui pensent être perchés sur les échelons du haut sous prétexte qu’ils parlent et écrivent sans faute. Après tout, qui a décidé un jour qu’on disait « des maux, des bocaux, mais pas des bancaux » ?
LAURENCE HOTTART, les Grignoux