Je suis un jour entré dans un lien
où chaque parole de l'un
était recueillie sans faute par l'autre.
Il en allait de même pour chaque silence.
Ce n'était pas cette fusion
que connaissent les amants à leurs débuts
et qui est un état irréel et destructeur.
Il y avait dans l'amplitude de ce lien
quelque chose de musical et nous y étions
tout à la fois ensemble et séparés
comme les deux ailes diaphanes d'une libellule.
Pour avoir connu cette plénitude,
je sais que l'amour n'a rien à voir
avec la sentimentalité qui traîne dans les chansons
et qu'il n'est pas non plus
du côté de la sexualité dont le monde
fait sa marchandise première,
celle qui permet de vendre les autres.
L'amour est le miracle d'être un jour
entendu jusque dans nos silences,
et d'entendre en retour avec la même délicatesse :
la vie à l'état pur, aussi fine que l'air
qui soutient les ailes des libellules
et se réjouit de leur danse.