ROBUSTE

Lorsque son bras droit et seul compagnon doit s’absenter pendant plusieurs semaines, Georges, star de cinéma vieillissante, se voit attribuer une remplaçante, Aïssa. Entre l’acteur désabusé et la jeune agente de sécurité, un lien unique va se nouer et marquer leur vie à jamais.

Robuste est un film d’une grande sensibilité qui émeut par sa pudeur et sa douceur. Il révèle ce qui ne saute pas nécessairement aux yeux dans la vie de tous les jours. On parlera de ces choses impalpables qui flottent dans l’air, des conséquences d’un échange de regards, de ces ondes magnétiques qui relient deux êtres en perdition. Cette rencontre entre deux corps et deux solitudes peut clairement se lire aussi, en creux, comme le portrait du plus grand comédien français en activité, Gérard Depardieu. La rencontre déterminante entre ces deux êtres n’est pas noyée dans une banale histoire de coup de foudre, car la réalisatrice contourne subtilement l’attendu et esquisse juste les prémices d’une romance. Elle fait preuve d’une grande sobriété dans les cadrages et les mouvements d’appareil, ce qui sublime la présence des corps et de leurs mouvements dans l’espace. C’est un film sur l’acceptation de soi, sur la difficulté d’être compris par les autres, sur les excès et les manques, sur la douceur et la solidité, sur la force du corps et la fragilité du cœur. Dans ce film, il arrive que le réel se mue en un léger fantastique qui esquisse les contours d’une autre dimension et renforce l’émotion générale. Par exemple, des nappes synthétiques transforment l’ambiance sonore lorsque le personnage incarné par Gérard Depardieu s’approche d’un aquarium aux couleurs bleutées et finit par le toucher, rentrant en communion avec ces poissons en voie de disparation. Jamais dans l’excentricité, Gérard Depardieu émeut profondément, tout comme la jeune comédienne Déborah Lukumuena (la révélation de Divines) qui fait preuve elle aussi d’une grande intelligence de jeu, dans la retenue et la suggestion. Robuste parle du fait de sortir de cette carapace qui nous empêche parfois d’être nous-même, pour alléger l’âme et retrouver la simplicité de l’enfance.

NICOLAS BRUYELLE, les Grignoux