La jeune fille qui va bien du titre s’appelle Irène, elle a 19 ans et vit à Paris en plein été 1942. Elle vit avec André, son père, Igor, son frère aîné, et Marceline, sa grand-mère. Elle est jeune et belle, aime la vie et le théâtre, voudrait ressentir pour un garçon « l’évidence ». Tous ses rêves pourraient devenir réalité. Devraient. Auraient dû… Elle est issue d’une famille juive. Des ombres se profilent, des missives liberticides creusent les rides du front de son géniteur, effacent fugacement l’éternel sourire de son aïeule. Au cours de théâtre, elle répète avec Jo la scène qu’ils vont jouer ensemble pour entrer au Conservatoire. Vive, insouciante et heureuse, Irène ne marche pas, elle court, elle vole. Parfois elle tombe, inanimée. Mais ces évanouissements réels lui permettant d’être crédible dans sa scène, elle les accueille comme tout le reste : avec joie. Puis Jo disparaît, sans qu’elle comprenne pourquoi. Puis il faut apposer le mot juif sur toutes les cartes d’identité. Puis soudain, la radio, les bicyclettes, le téléphone sont confisqués…

D’une grâce infinie, le film suggère l’époque plus qu’il ne la montre et, centré sur la figure d’Irène, sa soif de bonheur, son désir de tout embrasser, il fait ressentir à mesure qu’il avance comment le terrible danger a pu être occulté trop longtemps, resté au second plan. Malgré les signes, malgré la conscience des plus âgés que l’ennemi est là. Une scène étonnante parmi d’autres est celle où Marceline et une vieille amie fument comme en cachette sur le lit de la première et cherchent dans le dictionnaire la définition du mot « peur ». Précision de l’écriture, justesse du regard, et, dans cet écrin parfait, des acteurs regardés, magnifiés. Et jamais là où on les attend. André Marcon, Anthony Bajon, India Hair et Françoise Widhoff sont le chœur et le cœur battant qui entourent et cajolent cette Irène merveilleuse à laquelle Rebecca Marder, vivace et radieuse, confère une présence impressionnante.